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Interview Julien Fournié


Couturier designer, Julien Fournié a fondé sa Maison en 2009. ll intègre le prestigieux calendrier officiel des défilés de Haute Couture en tant que « membre Invité », en 2011 après trois collections. Depuis 2014, il crée également des collections de prê-à-porter de luxe, disponibles au Printemps Haussmann au sein du corner « Maria Luisa - Le Soir ».

«La Haute Couture doit être l’équivalent d’un laboratoire de recherche pour toute la mode. Elle doit constamment allier le meilleur de la tradition et la pointe de l’innovation.»

Votre dernière collection s'intitule « Premier Paradis ». Comment naît votre processus de création, toujours à partir d'un dessin, vous qui êtes un ancien étudiant en médecine ?

Un couturier comme moi puise son inspiration dans toutes ses activités, dans tout ce qu’il voit, dans tout ce qu’il étudie, dans toutes ses recherches. Donc, pour répondre à votre question : évidemment, mes études de médecine ont joué un rôle important, ne serait-ce que parce que je trouve que c’est important de connaître le corps humain pour l’habiller, en suivre les courbes, en dériver certaines formes. J'ai beaucoup aimé les dessins d’anatomie.

Les réaliser m’a permis, malgré moi, de peaufiner ma technique de dessin du corps humain. Maintenant, vous déclarer que mes inspirations viennent de la médecine, ce serait un peu exagéré. Elles viennent aussi de la musique, du cinéma, de la littérature, de la peinture. Ce qu’elles ont de commun, c’est toujours une émotion que j’essaie de retranscrire dans mes créations textiles pour accompagner les femmes que j’habille. Le dessin est essentiel dans ce processus.

Dessin au crayon ou dessin numérique ?

Pour « fixer » une idée que j’ai dans la tête et pour que l’équipe qui travaille avec moi connaisse exactement ma vision, dans la plupart des cas, nous passons d’abord par le dessin. Aujourd’hui, par exemple, je dessine toutes mes silhouettes sur ma tablette Ipad Pro, aussi bien pour créer mes collections que devant les clientes lorsqu’il s’agit d’imaginer une tenue pour une occasion spéciale.

Le dessin en 3D permet, évidemment, de traduire cette idée plus fidèlement encore, plus précisément… et donc, il permet d’aller plus vite, de mieux communiquer, d’améliorer, dès la phase de dessin. J’en profite pour ajouter que, si les rendus de dessins d’illustration de mode par exemple sont maintenant possibles sur tablette, il faut quand même savoir dessiner.

Comment le faites-vous évoluer ?

Aucune technique ne vous donnera le « coup de crayon »… Seule la pratique assidue et des cours de dessin vous apprendront à dessiner correctement. Important aussi de préciser que la 3D ne pourra pas non plus remplacer la phase essentielle du modélisme. On y recherche les volumes en travaillant directement avec le tissu sur des mannequins. Parfois, certaines pièces exigent même que l’on se passe du dessin.

C’est quelquefois la matière, le tissu qui indique ce qu’il convient de faire avec et qui devient source d’inspiration. Certains tissus exigent qu’on en touche la rondeur, qu’on en vérifie le tombé, qu’on en teste les plis, qu’on connaisse la manière dont ils acompagnent le mouvement…

Bien sûr, il y a aussi les essayages sur mannequin vivant qui sont une phase essentielle, pas seulement pour régler un ourlet, mais aussi pour vérifier le bien aller, l’impression générale, les fonctionnalités du vêtement.

Lorsque l’on exerce mon métier, chacune de ces phases est l’occasion d’être créatif par rapport aux contraintes que l’on avait prévues ou que l’on découvre. Alors le processus créatif n’est jamais une recette, il s’invente, lui aussi, à chaque fois ou presque.

Quant à savoir où je puise mon inspiration, c’est encore plus difficile à dire. Il n’y a aucune règle générale en ce qui me concerne. Je me rends pourtant bien compte, et ceux qui suivent mes collections aussi, je l’espère, qu’il y a chez moi des obsessions esthétiques qui reviennent, comme, par exemple, l’idée d’allonger la silhouette au maximum, mais aussi des effets en trompe-l’oeil, une fascination certaine pour la peau aussi, et, tout cela toujours à partir d’une émotion que je vais essayer de sortir pour en créer d’autres.

Collection Premier Paradis ©copyright Julien Fournié

Parlez nous des couleurs, du choix des tissus, des coupes, des matériaux...?

Parler n’est pas mon moyen d’expression favori. En choisissant la mode , j’ai aussi choisi un moyen de m’exprimer différent de celui du langage parlé ou écrit. J’ai l’ambition et le désir que mes modèles parlent pour eux-mêmes. Le reste, c’est un peu ma « cuisine ». Vous voyez, dans une architecture, je trouve toujours qu’il vaut mieux voir le bâtiment terminé que l’échafaudage qui l’entoure et le masque… mais pour vous en dire encore un peu plus.

Je crois que chez moi, comme chez d’autres couturiers ou designers de mode, il y a je crois un subtil équilibre entre les fonctions que l’on associe traditionnellement à l’hémisphère gauche du cerveau, plus normatif, et celles de l’hémisphère droit, plus imaginatif. Nos sociétés favorisent toujours les fonctions liées à l’hémisphère gauche. il nous est également utile, mais nous laissons aussi une place plus grande que d’autres, à notre intuition, à notre imaginaire, à l’imprévisible...

Dans vos collections Haute Couture, Prêt à Porter et Chaussures, on observe un mélange de matériaux bruts et innovants, comment procédez-vous et en quoi est ce essentiel pour vous ?

La Haute Couture doit être l’équivalent d’un laboratoire de recherche pour toute la mode. Elle doit constamment allier le meilleur de la tradition et la pointe de l’innovation. C’est la combinaison de ce grade de qualité avec l’audace qui constitue la pointe de l’ultra-luxe. Voilà pourquoi cet aspect est essentiel à mes yeux.

Parfois, et même la plupart du temps, l’innovation est aussi dans un élément invisible sur le modèle. Par exemple, c’est une manière de construire le vêtement, une technique d’assemblage et ce n’est pas forcément seulement dans un tissu nouveau ou dans un contraste de matières.

C'est qui la femme Julien Fournié ? Au quotidien comment est-elle ? A quoi rêve-t-elle ?

Je me contente de rêver pour elles. Je connais mes rêves, mais vous décrire les leurs, cela m’est impossible. Il y a forcément une part importante d’appropriation des vêtements qui se fait chez la femme qui les porte. La manière dont elle vit pourrait s’assimiler à la manière dont une actrice joue une texte ou à celui dont une interprète chante une chanson : cela n’appartient qu’à elle.

D’ailleurs, aujourd’hui, les femmes en général favorisent moins le « total look » qu’autrefois. Elles sont capables d’assembler dans leurs tenues des univers très différents, d’associer des modèles qu’elles tirent de collections qui, bien souvent, n’appartiennent pas à une seule marque , et même, pas à la même gamme de prix.

Ce n’est pas pour ne pas vous répondre que je dis cela. Pour moi, et la Haute Couture m’a renforcé dans cette conviction (puisqu’on y fait des modèles exclusifs pour des femmes d'exception qu’elles porteront d’ailleurs souvent pour un moment singulier de leur vie) : chaque femme est unique.

Alors, bien sûr, je connais mes clientes. Elles ont des points communs. Que dire ? Quelles sont les plus jeunes clientes de la Haute Couture ? C’est en grande partie vrai, mais même si certaines ne sont pas encore majeures, j’habille aussi leurs mamans…

Elles ont souvent un point commun : pour convaincre, charmer ou séduire, elles ont compris que ce n’est pas en singeant les hommes qu’elles obtiennent les meilleurs résultats. Elles savent affûter leurs armes propres, leurs qualités de femme.

Parlez nous de l'équipe qui vous entoure, de la première d'atelier Madame Jacqueline de la Maison « Au fil des saisons », de Nicolas Degennes, artiste du maquillage et de Jean Paul Cauvin Journaliste Mode....une synergie ?

Parlons en par ordre chronologique des rencontres. J’ai d’abord croisé Nicolas Degennes alors que j’étais en stage chez Givenchy après avoir remporté le Prix Moët et Chandon aux Fashion Awards en 2000, à ma sortie de l’Ecole de la Chambre Syndicale de la Couture Parisienne. Le prix me conduisait chez Givenchy, à l’époque où Alexander McQueen en était le directeur artistique.

Je travaillais aux accessoires et Nicolas Degennes était (et est toujours) l’âme du maquillage Givenchy. Pour les campagnes de Givenchy Make Up, il avait besoin d’accessoires. Vous vous souvenez peut-être d’une campagne avec Lou Doillon qui portait un chapeau en altuglass ? Voilà un des objets né de notre première rencontre.

Nicolas Degennes

Nicolas Degennes est un maquilleur exceptionnel. Il est devenu un ami d’une fidélité à toute épreuve. J’aime sa réflexion, sa légèreté aussi. Depuis notre rencontre, quelle que soit la Maison où j’ai travaillé, je n’ai jamais fait un défilé ou un shooting photo à Paris sans que ce soit lui, avec son équipe, qui en réalise les maquillages.

Je voudrais aussi parler d’une équipe de coiffeurs que j’ai rencontrée depuis maintenant plus de deux ans et qui m’accompagne depuis moins longtemps que Nicolas Degennes mais avec lesquels je m’entends très bien. Sous la houlette de Stephen Low et d’Elena Lavagni, qui dirigent le salon de luxeNeville, à Londres. Nous nous sommes rencontrés en 2013 à Singapour lors d’une fashion week à laquelle j’étais invité.

Ils signent, depuis 2014, toutes les coiffures de mes défilés et de mes shootings photo à Paris mai aussi où que j’aille défiler dans le monde, par exemple au Vietnam. Leur expertise et leur exigence vont bien avec le grade de qualité exigé par la Haute Couture.

J’ai mis du temps à trouver une équipe de coiffeurs à la hauteur, mais j’ai beaucoup de chance. Aujourd’hui, à mes côtés, avec Nicolas Degennes, ils forment une des meilleures équipes pour la beauté. C’est très important de collaborer avec d’autres artistes venus d’autres disciplines. J’ai la chance d’avoir aussi, de manière moins régulière, mais tout aussi fidèle, le regard de Gilles-Marie Zimmermann.

C’est un grand photographe qui, tout en respectant ma vision, donne une légèreté, et un naturel aux photos qu’il réalise qui ne s’expliquent pas et qui ne peuvent arriver qu’après des années d’expérience. Il doit réaliser les photos de ma prochaine collection. C’est la troisième fois cette saison que nous travaillons ensemble depuis que j’ai créé ma maison de couture…

Madame Jacqueline de la Maison « Au fil des saisons »

Comment vous parlez de ma première d’atelier, Madame Jacqueline ? Sa fonction est essentielle dans la Maison. Elle est là depuis le début. Nous nous connaissions bien, puisque nous avions travaillé ensemble dès 2003, lorsque je suis entré comme Directeur Artistique de la maison Torrente Haute Couture. Elle travaillait déjà dans cet atelier.

Surtout, Jacqueline connaît toute la tradition de la Haute Couture et possède une qualité exceptionnelle à mes yeux : elle ne craint pas l’innovation. Pour vous donner un exemple, elle est de toutes les expérimentations que nous faisons au sein du FashionLab de Dassault Systèmes. C’est exceptionnel pour une dame de son âge…

Entre nous, il y a un esprit de compagnonnage, une complicité forgée dans notre atelier, collection après collection, cliente après cliente, robe après robe, depuis 2009. Nous sommes tous les jours dans le réel. Elle peut partir au bout du monde faire un essayage pour une princesse.

Aujourd’hui, elle est partie au Festival de Cannes pour habiller une star internationale (Maud Wyler) qui va monter les marches habillée en Julien Fournié, demain elle sera là pour peaufiner avec moi la prochaine collection. Il n’y a rien de factice dans notre relation.

Nous sommes tous les jours à la poursuite de l’élégance, de la pertinence, de la beauté.

Jean Paul Cauvin Journaliste Mode

Quant à Jean-Paul Cauvin, je ne sais pas comment définir mieux ce qui nous unit qu’en disant qu’il est mon « double ». Nous nous connaissons depuis maintenant plus de treize ans. Ce journaliste de mode brillant a abandonné ses fonctions pour devenir le Directeur Général de ma maison, mais il est bien plus que cela à mes yeux.

En plus de veiller à son développement, il m’accompagne (et me précède même parfois) dans bien des domaines : les partenariats, mais aussi la musique de nos défilés dont il réalise avec moi les bande-sons, les castings. Nous vivons une aventure humaine passionnante et j’apprécie beaucoup sa persistance, comme j’ai besoin de son regard particulier, à la fois exigeant et toujours bienveillant.

Il est constamment à la recherche de la vérité. Je ne me vois pas avancer sans lui parce qu’il a cette capacité à se mettre à ma place sans jamais vouloir la prendre. Il y a beaucoup de respect et d’affection dans notre relation. C’est incroyable à quel point nous pensons les mêmes choses au même moment.

J’insiste pour dire que je ne pourrais pas faire ce que je fais sans les autres. il y en aurait encore beaucoup à citer. A commencer par mes parents. Mais aussi mes assistants passés ou actuels : Marine, Wendy, Margot, tous ceux qui travaillent à l’atelier, les réalisateurs de talent qui multiplient les films sur les coulisses de mes défilés, de mon atelier… mes clientes bien sûr sans lesquelles je ne pourrais rien faire, mes partenaires, mes amis, les mannequins...

Une maison de couture existe autour d‘un couturier mais elle n’existe qu’en étant la conjugaison de tous ces talents réunis.

Pendant vos récents défilés, un homme se tient non loin de l'entrée du défilé et par un geste élégant de la main, permet aux mannequins de descendre sur le plateau, en servant d'appui, pourquoi cette mise en scène ?

Parce que, vous le dites vous-même, c’est élégant un homme qui tend le bras à une femme pour l’aider à descendre une marche. Aujourd’hui, on a un peu perdu ces gestes de la galanterie. Il se trouve que nous avons eu cette idée en défilant pour la première fois à l’Oratoire du Louvre, un lieu somptueux qui sert d’écrin à mes défilés depuis deux ans. Nous ne voulions pas recouvrir le sol très beau par un podium. Mais il y avait une marche, ce qui s'avère dangereux pour les mannequins dans un défilé.

Alors, nous avons saisi cette occasion pour mettre en lumière ce geste, aujourd’hui devenu un « code » de la maison puisque nos défilés ont lieu dans ce même lieu depuis.

Pourquoi avez vous choisi le terme « premier (e)» pour désigner vos collections*, « Premier Paradis » printemps été 2016....

Par humilité d’abord. Le premier titre de collection était « Premiers Modèles »*. C’était en quelque sorte pour dire que c’était un début, un « work in progress ». Nous avons conservé cet aspect pour les deux saisons suivantes avec « Premier Été » et « Premier Hiver ». C’était tout naturel. Et puis, nous avons eu le temps de réfléchir et nous nous sommes dit que nous allions conserver ce caractère. D’abord pour montrer que la Couture , c’est aussi, à mon sens quelque chose de « nouveau » et d'essentiel.

Il y a aussi chez moi cette recherche, j’en parle souvent, en faisant le parallèle avec l’art de la calligraphie-

du geste premier du calligraphe chez lequel on sent l’expérience à travers l’exécution d'un coup de pinceau. C’est pour cela qu’avant un substantif qui donne un peu la note de la collection selon la saison, nous conservons toujours ce qualificatif de « premier » .

Ce qui est primordial pour nous, c’est de garder cette « fraîcheur », de dire combien nous tenons à cette recherche à la fois d’une épure, d’un geste premier et d’une démarche nouvelle, aussi bien dans le dessin que dans la coupe ou dans l’allure.

Depuis quand suivez vous le « See now, buy now » (mise en vente de la collection juste après le défilé) (d'ordinaire la collection automne-hiver défile en février-mars, et la collection printemps-été défile septembre-octobre, il y a six mois d'attente, six mois qui étaient nécessaires à la production de la collection) aujourd'hui comment faites-vous et pourquoi ? L'ancien huis clos des défilés n'existe plus, avantage ou inconvénient ?

Depuis que la Haute Couture existe, la cliente de Haute Couture commande sa robe directement après le défilé. En fait, c’est la Haute Couture qui a créé le « See Now, Buy Now ». En créant les premiers défilés de mode dans la seconde moitié du XIXème siècle à Paris, Charles Frederick Worth a fait défiler des modèles que les clientes pouvaient commander en les voyant portés par des mannequins qui leur ressemblaient.

Avant cela, elles achetaient une robe en choisissant le tissu et en faisant confiance à la couturière qui exécutait la pièce sans en avoir la vision préalable. Il se trouve que la Couture est , aujourd’hui encore, dans notre maison, l’origine et le coeur de notre activité.

A partir des années 1960 est venu le temps du prêt-à-porter des Créateurs de mode qui impliquait un défi de production des pièces avant qu’elles n’arrivent en boutique et donc du temps supplémentaire.

Depuis, les vêtements sont prototypés, puis les prototypes sont présentés en défilé, grosso modo au moment des achats par les boutiques. Les produits sont ensuite livrés une fois la production en nombre accomplie, ce qui représente un délai incompressible, Depuis quelques années, Internet a bouleversé tout cela, avec un certain goût des distributeurs pour l’accélération des collections.

Du coup, on a, en boutique -même sans parler de l’immédiateté de la diffusion des images des défilés de mode via Internet- des collections qui sont en vente sans aucun rapport avec la météo ou la température qu’il fait à ce moment-là sur le seuil de la boutique.

Défiler dans le calendrier de la Haute Couture nous a donné du temps pour réfléchir à ce « timing ». Dès notre défilé de juillet 2014, nous avons présenté sur le podium, en complément à la collection Couture, des pièces de prêt-à-porter de luxe qui étaient en vente au Printemps Haussmann dès que le défilé avait eu lieu.

C’est grâce notamment à Maria Luisa, acheteuse de légende, alors Fashion Editor du Printemps que nous avons pu mettre au point cette stratégie qui permet aux clientes de trouver tout de suite dans leur grand magasin, une pièce qu’elles ont aimé en voyant une photo sur Internet au moment du défilé. Nous avons pris le problème à l’envers : c’est au moment des défilés que les acheteurs du prêt-à-porter de luxe passent commande des pièces qui leur seront livrées entre deux et quatre mois plus tard.

Puisque les collections de Haute Couture défilent au moment où elles sont disponibles en boutique, pourquoi ne présenterions-nous pas aux acheteurs les collections correspondantes dans leur version prêt-à-porter au moment où ils viennent faire leurs achats, pour les livrer juste avant qu’elles ne défilent sur le podium, en janvier et en juillet ?

Nous avons été pionniers dans ce domaine en appliquant simplement ce que la Haute Couture fait depuis toujours : vendre au moment où les pièces sont présentées. Cest ce que nous continuons de faire aujourd’hui.

INNOVATION MODE ET TECHNOLOGIE

Vous avez créé le Fashion Lab -incubateur technologique- avec Dassault Systèmes, alors les logiciels de design 3D et la mode meilleurs amis ?

Lorsque nous avons rencontré Bernard Charlès, Monica Menghini et Jérôme Bergeret à la direction de Dassault Systèmes, le design 3D n’était pas très en vogue dans la mode. il y avait, de part et d’autre, des réticences, des craintes, que nous sommes fiers d’avoir déjà contribué à faire disparaître progressivement depuis 2010 en créant ensemble, le FashionLab dès janvier 2011. Ce qui m’intéresse le plus, c’est de dialoguer avec les ingénieurs et les équipes de Dassault Systèmes qui mettent au point avec nous les technologies et les outils de demain.

Ensemble, nous nous sommes rendu compte que les solutions qui existent concernant le design de voitures, par exemple, ne pourraient convenir, seules, à la mode. Un élément est capital dans ce domaine : le tissu.

Que permet le digital ? Comment des logiciels pour les avions ont ils été adaptés pour votre travail de couturier designer ?

Il s’agit d’un matérieu souple, qui n’a pas seulement un poids et une résistance mais aussi une certaine « rondeur », une capacité à réagir au mouvement, à voleter avec le vent, à s’enrouler autour du corps ou à s’en éloigner selon la manière dont il est assemblé. Il s’agit là d’un vrai travail de recherche et développement que nous avons entrepris passionnément avec Dassault Systèmes, un des leaders mondiaux en la matière.

Lorsque l’on parle de 3D aujourd’hui, beaucoup font uniquement le parallèle avec l'impression 3D. Cela apporte , c’est vrai , quelque chose d’important qui fait bouger les lignes. Mais la 3D, ce n’est pas seulement une imprimante qui peut faire du volume.

Je dirais même que ce n’est que la partie émergée de l’iceberg. ce qui nous intéresse, c’est de pouvoir, par exemple, dessiner en 3D, de façon suffisamment réaliste pour pouvoir simuler la souplesse et le caractère mouvant du tissu, du cuir... C’est grâce à ces recherches que la 3D pourra devenir un outil de conception pour la mode.

Comment avec l'innovation digitale repenser l'industrie de la mode ?

Tous les métiers évoluent constamment. Nous pensons qu’en France, malgré un patrimoine et un savoir faire uniques au monde, on a trop peu valorisé les métiers de la main dans l’imaginaire collectif.

Plus nous avançons dans nos travaux de recherche et plus une évidence et une conviction nous apparaissent : les solutions qu’apportent les technologies nouvelles doivent faciliter le travail des artisans d’art qui sont au coeur de toutes les industries du luxe.

Comment moderniser ces métiers par les nouvelles technologies ?

Leur activité serait en danger si elle se contentait de perpétuer des traditions sans les adapter aux outils qui vont révolutionner le futur. Cette évolution se fera d’autant plus facilement que la nouvelle génération est constamment devant son écran connecté.

C’est là l’occasion de valoriser à nouveau notre patrimoine d’excellence de la main d’une nouvelle manière : en alliant technologie et geste artisanal. Nous sommes convaincus que c’est aussi l’occasion de replacer le designer, « l’artiste » au cœur du dispositif.

En quoi les nouvelles technologies permettraient de créer des emplois notamment dans le domaine des métiers de l'artisanat de la mode, du tissage, de la broderie, de la dentelle etc ?

Avez vous des exemples à nous citer en ce sens de déjà accomplis ?

Tout le dispositif mis en place par l’industrie de la mode et sa distribution s’apprête à connaître une révolution. Le public le pressent. Pour que cette révolution numérique ait lieu, il est indispensable que des ingénieurs et des designers de mode entretiennent un dialogue constant, non seulement pour développer des technologies nouvelles, mais aussi pour définir leurs rôles respectifs.

Si les couturiers et les créateurs de mode sont au coeur de ce dispositif, la créativité sera sauvée. Et il faudra aussi des ouvrières formées pour intégrer les nouvelles technologies pour qu’elles puissent être utilisées jusque dans l’industrie et l’artisanat d'art.

Qu'est-ce que le concept de Haute Couture On Cloud...

Voici une illustration de notre recherche avec le FashionLab qui va bien au-delà des activités de design. Je l’ai dit, le tissu est essentiel dans la mode. Nous le « sourçons » avec nos fournisseurs habituels, parfois grâce à des dessins originaux que j’exécute moi-même dans mon studio ou avec des créations que notre réseau nous fournit en exclusivité, notamment lors du Salon Première Vision qui est là encore un événement mondial qui a lieu à Paris.

Là aussi, l’innovation est de mise, qu’il s’agisse de dentelles, de jacquards, de tissus à reliefs. Or, chaque tissu réagit différemment, à un coût particulier qui varie selon les métrages commandés, etc.

En résumé, Haute Couture on Cloud est une aide pour le designer qui lui permet de rationnaliser ses emploi de tissu, mais aussi de communiquer avec l’ensemble de sa chaîne de fabrication (de son fournisseur de tissu, à ses façonniers industriels, à son studio de création, à son atelier de prototypage, à ses boutiques) pour pouvoir en estimer le coût, le prix de revient, le prix wholesale, le prix public.

C’est une aide considérable pour des entreprises de ma taille qui n’avaient pas accès à des outils performants dans ce domaine.

Un Mot pour la fin, une citation et quelque chose à ajouter que vous trouvez essentiel.

Je rêve, donc je suis.

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